Gravel c. Fournier  (2002)

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Date : 2002-12-30
Dossier : 500-22-074202-022

JF 0713

COUR DU QUÉBEC

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE MONTRÉAL
LOCALITÉ DE MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° : 500-22-074202-022

DATE : 30 décembre 2002
__________________________________

SOUS LA PRÉSIDENCE DE
L’HONORABLE
CLAUDE FILION, J.C.Q.

__________________________________

plaideur vexatoire HUBERT GRAVEL
Demandeur-intimé

c.

ALBERT FOURNIER
Défendeur-requérant

__________________________________

JUGEMENT
SUR UNE REQUÊTE DU DÉFENDEUR POUR FAIRE DÉCLARER
LE DEMANDEUR PLAIDEUR VEXATOIRE

__________________________________

[1] Le défendeur présente une requête aux fins de déclarer le demandeur plaideur vexatoire en se basant sur les termes de l’article 20 C.p.c..

[2] Le défendeur invoque essentiellement l’historique du litige judiciaire opposant les parties. À cet égard, la Cour réfère au paragraphe 2 du jugement qu’elle rend sur la requête en irrecevabilité. Le défendeur allègue également tous les incidents judiciaires qui ont marqué chacun des dossiers. De plus, le procureur argumente que le défendeur est âgé de 90 ans et qu’il n’est plus en mesure de recevoir des procédures judiciaires découlant du litige entre les parties.

[3] La Cour note tout d’abord que le défendeur n’a été l’instigateur que de deux dossiers judiciaires, soit la première action en dommages-intérêts qui a fait l’objet d’un désistement et la seconde, contenue au présent dossier, qui fait l’objet d’une requête en irrecevabilité que la Cour accueille.

[4] En ce qui concerne la défense et demande reconventionnelle produite par le demandeur, celle-ci a été déposée dans une requête en délaissement présentée par le défendeur.

[5] Relativement aux incidents judiciaires qui ont marqué chacun des dossiers, l’expérience de la Cour est à l’effet que beaucoup de dossiers présentés à la Chambre civile de la Cour du Québec recèlent un nombre à peu près similaire de procédures judiciaires accessoires au fond du litige. Bien que cette situation soit malheureuse, il n’en demeure pas moins qu’elle existe. Les modifications apportées au nouveau Code de procédure civile (LQ. 2002, c. 7), lesquelles entreront en vigueur le 1er janvier 2003, permettront vraisemblablement de diminuer sensiblement les débats accessoires au fond du litige.

[6] Le droit de poursuivre devant les tribunaux est un droit sacré garanti par la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Même si la présente requête ne vise pas à faire disparaître ce droit mais bien plutôt à l’encadrer, il n’en demeure pas moins qu’une telle mesure limite certains droits fondamentaux. Ainsi, les articles suivants de la Charte québécoise méritent-ils d’être soulignés :

«1. Tout être humain a droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, à l’intégrité et à la liberté de sa personne.

Il possède également la personnalité juridique.

3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association.

4. Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

6. Toute personne a droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens, sauf dans la mesure prévue par la loi. »

[7] L’article 23 de la Charte québécoise prévoit l’exercice des droits judiciaires :

«23. Toute personne a droit, en pleine égalité, à une audition publique et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant et qui ne soit pas préjugé, qu’il s’agisse de la détermination de ses droits et obligations ou du bien-fondé de toute accusation portée contre elle. »

[8] Aussi sacré que soit le droit d’ester en justice, il n’en demeure pas moins que d’un autre côté, il faut certes éviter à ce que les cours de justice ne soient paralysées par des bombardements systématiques de procédures judiciaires ou que certains justiciables ne soient judiciairement harcelés. Les jugements suivants rendus en Cour supérieure illustrent le type de plaideur qui peut faire l’objet d’un encadrement de la nature d’une autorisation préalable de recours par le tribunal :

- Barreau du Québec c. Frank Siminski et mis en cause [1];

- Valery I. Fabrikant c. Dr Serge Corbin et mis en cause [2];

- Dans l’affaire de la faillite de : Ura Greenbaum, failli et Le Groupe Boudreau Richard inc., syndic [3]

[9] Dans son étude “La pathologie et thérapeutique du plaideur trop belliqueux“[4], l’honorable juge de la Cour d’appel, Yves-Marie Morrissette, alors professeur titulaire à la Faculté de droit de l’Université McGill, fait état d’une série d’indices « qui mérite d’être considérée afin de déterminer si une partie se comporte dans l’instance d’une manière vexatoire ». Ces caractéristiques, tirées d’une jurisprudence ontarienne, sont les suivantes :

« a) constitue une procédure vexatoire le fait d’intenter une ou plusieurs actions pour trancher une question déjà tranchée par un tribunal compétent;

b) l’action est vexatoire lorsqu’il est évident qu’elle ne peut réussir, ou qu’il ne peut en résulter rien d’utile, ou qu’aucune personne raisonnable ne peut raisonnablement s’attendre à en tirer un redressement;

c) sont aussi vexatoires les actions intentées à des fins répréhensibles, comme la volonté de harceler ou d’oppresser d’autres parties par des procédures multiples intentées à des fins autres que la revendication de droits légitimes;

d) les procédures vexatoires ont généralement pour caractéristique de réitérer les mêmes arguments et les mêmes questions par des procédures successives où ils sont répétés et amplifiés, souvent dans des actions intentées contre les avocats qui ont occupé pour ou contre la partie en cause dans des procédures antérieures;

e) pour déterminer si des procédures sont vexatoires, le tribunal doit considérer dans son ensemble toute la chronologie du litige et non pas seulement si celui-ci avait un fondement réel à son origine;

f) le défaut par la partie qui institué les procédures de payer les dépens de procédures antérieures qui ont échoué est un facteur à considérer pour déterminer si les procédures sont vexatoires;

g) le fait pour une partie de persister sans succès à porter en appel des décisions judiciaires peut être considéré comme un comportement vexatoire. »

[10] Dans le présent dossier, le nombre non encore excessif de procédures intentées par le demandeur constitue un élément que la Cour retient. La nature de ces procédures en est un autre. Le désistement de la première action en dommages-intérêts est également pris en considération. Enfin, à cette étape-ci, la preuve ne permet pas de conclure à une volonté d’harcèlement ou d’oppression de la part du demandeur.

[11] Il est exact que le demandeur a été déclaré plaideur vexatoire dans un autre dossier l’opposant à la Banque canadienne Impériale de commerce [5]. Cependant, ce dossier se distingue du présent dossier en ce que les recours, procédures frivoles et abusives sont très nombreuses et ne peuvent être comparées en nombre ou en qualité à celles instituées à l’occasion du présent litige.

[12] À ce stade-ci, la Cour ne peut se rendre aux arguments du défendeur et déclarer le demandeur plaideur vexatoire. En effet, la Cour doit juger du présent dossier dans l’état où il se trouve aujourd’hui.

[13] La requête du défendeur doit être rejetée et, vu les circonstances, sans frais.

[14] POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[15] REJETTE la requête du défendeur et, vu les circonstances, sans frais.
 

__________________________________

CLAUDE FILION, J.C.Q.

M. Hubert Gravel
(sans procureur)
101 Place Charles-Lemoyne # 908
Longueuil (Québec) J4K 2T3

Me Benoît Tremblay
9124, 16e Avenue
Montréal (Québec) H1Z 3P7

Date d’audience : 5 décembre 2002

[1] REJB 1999-12677 (C.S.), 500-05-046728-984

[2] REJB 2000-19412 (C.S.), 455-05-000418-009

[3] REJB 2002-33288 (C.S.), 500-11-004165-920

[4] Barreau du Québec – Service de la formation permanente – Développement récent en déontologie, droit professionnel et disciplinaire, 2001, volume 155, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais, 2001, p.167

[5] Cour supérieure, district de Longueuil, no 505-05-004032-972

 

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"Sed quis custodiet ipsos custodes?" — Juvénal, Satires, VI, 346.  En français : « Qui nous protègera contre ceux qui nous protègent ? »  In English: " Who will protect us from those who protect us? "

 — Mauro Cappelletti dans Louis Favoreu (dir.), Le pouvoir des juges, Paris, Economica, 1990, p. 115.
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“In public regulation of this sort there is no such thing as absolute and untrammelled ‘discretion’, that is that action can be taken on any ground or for any reason that can be suggested to the mind of the administrator; no legislative Act can, without express language, be taken to contemplate an unlimited arbitrary power exercisable for any purpose, however capricious or irrelevant, regardless of the nature or purpose of the statute. Fraud and cor­ruption in the Commission may not be mentioned in such statutes but they are always implied as exceptions. ‘Discretion’ necessarily implies good faith in discharging public duty; there is always a perspective within which a statute is intended to operate; and any clear departure from its lines or objects is just as objectionable as fraud or corruption.”

— Mr. Justice Ivan Cleveland Rand writing in the most memorable passage in Roncarelli v. Duplessis, [1959] S.C.R. 121 at the Supreme Court of Canada, page 140.
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The social tyranny of extorting recantation, of ostracism and virtual outlawry as the new means of coercing the man out of line, is the negation of democracy.

— Justice Ivan Cleveland Rand of the Supreme Court of Canada, Canadian Bar Review (CBR)
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Fears are mounting that the psychiatrist Anatoly Koryagin is near to death in the notorious jail of Christopol in central Russia. Letters that have reached the West from his wife and a friend indicate that he is so weak that unless he is given expert medical care he could die at any time. Dr. Koryagin has been in prison for the last four years for actively opposing the political abuse of psychiatry. The abuse takes the form of labeling dissidents as mad and forcibly treating them with drugs in mental hospitals.   ― Peter B. Reddaway, "The Case of Dr. Koryagin", October 10, 1985 issue of The New York Times Review of Books
"If we were lawyers, this would be billable time."
A Word on Caricature
“Humor is essential to a successful tactician, for the most potent weapons known to mankind are satire and ridicule.”

— “The Education of an Organizer”, p. 75, Rules for Radicals, A Practical Primer for Realistic Radicals by Saul Alinsky, Random House, New York, 1971.

I am no fan of Saul Alinsky's whose methods are antidemocratic and unparliamentary. But since we are fighting a silent war against the subversive Left, I say, if it works for them, it will work for us. Bring on the ridicule!  And in this case, it is richly deserved by the congeries of judicial forces wearing the Tweedle suits, and by those who are accurately conducting our befuddled usurpers towards the Red Dawn.

— Admin, Judicial Madness, 22 March 2016.
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