2002-09-03 Committee on Institutions

Journal des débats (Hansard)
of the Committee on Institutions
Version finale

36th Legislature, 2nd Session
(March 22, 2001 au March 12, 2003)
Tuesday, September 3, 2002 – Vol. 37 N° 90

Consultation générale sur le document intitulé Mesures visant à instituer un nouveau Code de procédure civile et comportant une proposition quant aux deux premiers livres de ce code

Table des matières

Auditions (suite)

Chambre des notaires du Québec (CNQ)
Document déposé

Remarques finales

Mme Michèle Lamquin-Éthier
M. Paul Bégin

Autres intervenants

M. Claude Lachance, président
* M. Claude Laurent, Chambre des notaires du Québec (CNQ)
* M. Gérard Guay, idem
* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quatorze heures une minute)

Le Président (M. Lachance): À l’ordre, s’il vous plaît! Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à une consultation générale et tenir des auditions publiques sur le document intitulé Mesures visant à instituer un nouveau Code de procédure civile et comportant une proposition quant aux deux premiers livres de ce code.

Est-ce qu’il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n’y a pas de remplacement annoncé.

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, je souhaite la bienvenue à tous les participants, en rappelant aux membres de cette commission et aux autres personnes qui sont présentes dans cette salle de bien vouloir fermer tout ce qui s’appelle bidules qui peuvent émettre des sonneries durant la séance, s’il vous plaît.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, j’invite le dernier groupe que nous entendons lors de cette consultation. C’est la Chambre des notaires du Québec. Alors, bienvenue, messieurs. Je vous demande de bien vouloir vous identifier et je vous indique que vous avez 20 minutes pour nous faire part de vos commentaires.

Chambre des notaires du Québec (CNQ)

M. Laurent (Claude): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mme la députée de l’opposition officielle, Mmes, MM. les députés, alors, je me présente, Claude Laurent, notaire et je suis le directeur du développement de la profession à la Chambre des notaires. Je suis accompagné de Me Gérard Guay, également notaire de pratique privée. Me Guay est un spécialiste de la procédure civile et est chargé de cours en procédure non contentieuse, or dorénavant gracieuse, à la Faculté de droit de l’Université de Montréal.

Alors, mesdames, messieurs, je profite dès maintenant de l’occasion pour vous remercier d’avoir invité la Chambre des notaires à prendre part aux travaux de la commission. Alors, comme vous le constatez Me Denis Marsolais, président de la Chambre, n’a malheureusement pas pu se libérer malgré tous les efforts qu’il a consacrés pour y arriver. Il demeure bien évidemment très intéressé par les travaux visant la réforme du Code de procédure et il entend bien y participer.

Ceci dit, c’est une fois de plus avec la plus grande attention que la Chambre des notaires a pris connaissance du document intitulé Mesures visant à instituer un nouveau Code de procédure civile et comportant une proposition quant aux deux premiers livres de ce code. Nous constatons que la réforme proposée constitue une véritable refonte de la procédure civile, et ce, dans la lancée du projet de loi n° 54 adopté en juin dernier par l’Assemblée nationale.

S’il est vrai que le ministère de la Justice poursuit la réforme déjà entamée de la procédure civile en y intégrant des dispositions qui ne manqueront pas d’améliorer le droit procédural, il demeure malheureusement que cette réforme est encore axée sur la pratique du droit adversarial. En effet, chaque étape de la réforme nous confirme que, si les mesures amiables et de déjudiciarisation n’ont pas été négligées, elles demeurent, pour nous, encore trop timides. L’étape actuelle, a priori surprenante dans le contexte où le projet de loi n° 54 vient à peine d’être sanctionné, comporte quelques embûches pour les notaires. La procédure judiciaire n’est certes pas la principale fonction des notaires, mais les matières gracieuses représentent pour eux et pour les justiciables qu’ils desservent, sur le plan de leurs attributs fondamentaux, une des assises les plus importantes de leur participation à la justice et à l’appareil judiciaire. Nous réservons nos commentaires sur cet aspect en deuxième partie de notre présentation et nous aborderons dès maintenant nos commentaires plus techniques sur certaines dispositions de la réforme.

M. le ministre, lors de la rédaction de notre mémoire, nous étions à toutes fins pratiques convaincus que le document à l’étude, bien que composé de dispositions législatives ordonnées, ne mènerait pas à la présentation et à l’adoption d’un projet de loi à l’automne qui vient. Or, il ressort de vos discussions lors des travaux de cette commission que c’est précisément ce que vous comptez faire. Or, bien que nous ne soyons pas directement concernés par la majorité des modifications apportées au Code de procédure civile, nous demeurons d’avis qu’il n’est pas souhaitable d’adopter à la pièce chacune des phases de la réforme.

Comme nous l’avions exprimé dans notre mémoire, l’entrée en vigueur des phases II et III du Code doit être la même non seulement pour éviter que les justiciables ne fassent les frais des difficultés d’interprétation qui ne manqueront pas de surgir mais aussi pour la communauté juridique qui se doit d’être prête lors de l’entrée en vigueur de la loi. Nous vous demandons en conséquence de surseoir à la présentation d’un projet de loi à l’automne et d’attendre les commentaires sur la phase III à venir avant de déposer un projet de loi global lequel sera le nouveau Code de procédure civile. Nous sommes convaincus que vous avez les qualités requises, M. le ministre, pour compléter et mener à bien cette importante réforme au cours des prochains mois.

Concernant un des aspects du caractère public de la justice civile, soit l’accès aux dossiers confidentiels prévu aux articles 6 à 11, la rédaction actuelle de l’article 9 entraînerait une difficulté d’application quant aux règles applicables devant notaire, celles qui sont prévues aux articles 863.4 et suivants actuels. En effet, le notaire, ayant reçu la demande, devrait avoir accès aux dossiers confidentiels, puisque, dans ces instances, il n’agit pas à titre de procureur. Or, puisque le deuxième alinéa de cet article déclare confidentielles les évaluations médicales et psychosociales, le risque que le notaire ne puisse avoir accès à ces documents après leur dépôt aux dossiers de la Cour est réel.

Dans un autre ordre d’idées, les règles concernant la gestion de l’instance, lesquelles sont essentiellement les mêmes que celles introduites par le projet de loi n° 54, permettront certainement de réduire la durée des instances. Cependant, bien que nous appuyons la possibilité d’une conférence de règlement à l’amiable, telle que prévue à l’article 152, nous vous invitons à aller encore plus loin en prévoyant la possibilité qu’une médiation puisse être imposée par le juge et qu’elle soit présidée par un médiateur accrédité lorsque l’objet du litige s’y prête ou lorsque les parties y consentent. Tant la Cour supérieure, par le biais de son service de médiation, que la Cour d’appel et les avocats, notaires, comptables, ingénieurs et autres professionnels regroupés au sein de l’Institut de médiation et d’arbitrage du Québec possèdent les connaissances et l’expertise nécessaires pour mener à bien ces médiations.

La réforme du Code est sans conteste une occasion privilégiée pour développer les méthodes alternatives de résolution des conflits tant dans l’intérêt des justiciables que pour placer le Québec au diapason des autres juridictions nord-américaines. Il s’agit ici de fournir aux tribunaux tous les outils nécessaires leur permettant de résoudre les litiges civils à la plus grande satisfaction des parties qui auront ainsi su trouver une solution acceptable à leur différend.

Le recours à la médiation ou à la conciliation est certes préférable lorsque les parties consentent à se prêter à l’exercice. Mais nous sommes de ceux qui croient que la médiation ou la conciliation, même si elle était imposée par le juge, mènerait à un règlement rapide et acceptable par les parties. Nous soutenons que la mission de conciliation des tribunaux dévolue à l’article 4, même si elle devait être imposée aux parties lorsque les circonstances s’y prêtent, est non seulement acceptable mais aussi souhaitable.

Juste quelques mots maintenant concernant les règles relatives à l’enquête contenues aux articles 261 à 294. Bien que nous approuvions les modifications proposées, nous sommes obligés encore une fois de constater qu’elles ne vont pas encore assez loin pour assurer aux témoins le respect auquel ils ont droit. Nous constatons, à titre d’exemple, que les procureurs invoquent trop souvent l’urgence, entre guillemets, pour obtenir l’émission d’un subpoena dans un délai moindre que celui prévu au Code pour qu’un témoin se rende au tribunal. Il s’agissait, a priori, d’une règle d’exception qui, au fil du temps, semble être interprétée différemment d’un district judiciaire à l’autre. Nous sommes d’opinion que cette règle doit demeurer exceptionnelle et être jugée au cas par cas; seuls les cas qui exigent vraiment une telle urgence devraient être accordés. C’est pourquoi, nous recommandons que le caractère exceptionnel d’une telle demande de réduction du délai soit précisé.

M. Bégin: …

M. Laurent (Claude): Précisé.

M. Bégin: Précisé. Merci.

n (14 h 10) n

M. Laurent (Claude): J’aborde maintenant une question qui, pour nous, est fondamentale: les matières gracieuses. Alors, l’introduction de cette notion de «matière gracieuse» n’est pas que terminologique; l’utilisation de l’expression «matière gracieuse» est certes préférable à celle de «procédure non contentieuse» et, à cet égard, elle place notre droit procédural au diapason des autres pays de tradition civiliste. La juridiction gracieuse du tribunal est un de ses attributs fondamentaux. En effet, le tribunal assume deux missions: le règlement des litiges, c’est la juridiction contentieuse, et la mise en application de la loi en dehors de tout litige, c’est la juridiction gracieuse, laquelle juridiction gracieuse s’articule autour de deux pôles: l’absence de litige et l’existence du contrôle judiciaire.

Vous comprendrez donc que l’utilisation de cette expression n’est d’aucune manière problématique pour les notaires, puisque, depuis de nombreuses années, nous comprenons indistinctement l’expression «matière gracieuse» et «procédure non contentieuse». Pour les notaires, le changement de terminologie ne sera aucunement source de confusion et ne prêtera pas à interprétation. Nous approuvons donc l’introduction de la juridiction gracieuse dans notre Code. Nous suggérons toutefois qu’elle soit traitée au titre I du nouveau Code, puisqu’il s’agit d’un élément fondamental de la procédure civile et non un simple pouvoir des tribunaux.

Cependant, nous désirons vous prévenir de certains écueils causés par les dispositions proposées. Au terme du document de consultation, il nous apparaît que la définition des matières gracieuses, la liste à venir de ce qui en fait partie et leur assujettissement à la demande introductive d’instance représentent une menace susceptible d’entraîner, à plus ou moins long terme, un point final à leur évolution et peut-être même à leur mise en rancart. Voici pourquoi:

La définition que vous proposez de la «matière gracieuse» soulève d’importantes interrogations. En effet, après avoir pris connaissance des codes de procédure civile d’autres pays d’Europe, nous demeurons perplexes devant la définition proposée. Le Code de procédure civile français, pour sa part, fait référence à l’absence de litige et au contrôle judiciaire mais n’intègre pas l’absence d’adversaire connu ou présumé comme critère. Nous considérons, quant à nous, que, s’il y a absence de litige, c’est forcément parce qu’il y a absence d’adversaire, lequel terme se définit comme suit: C’est une personne qu’on affronte dans un conflit, un combat, un jeu, un antagoniste. Pourquoi alors a-t-on choisi, dans la définition proposée, d’ajouter, à titre de critère, l’absence d’adversaire connu ou présumé? Cela ne va-t-il pas de soi? De plus, en présumant qu’il soit utile ou nécessaire de préciser que la matière gracieuse se caractérise également par l’absence d’adversaire, nous nous questionnons encore sur la portée de l’expression «adversaire présumé». On peut concevoir que, dans un cadre de revendication non équivoque, qu’il y ait un adversaire dont l’identité n’est pas encore connue mais dont l’existence est certaine. Nous croyons qu’il s’agit là du sens à donner à l’expression «adversaire présumé». Mais non balisée, cette expression peut avoir une portée qui attaque le principe même de la matière gracieuse.

La doctrine s’entend pour affirmer qu’en matière gracieuse il n’y a pas d’adversaire, puisqu’il n’y a pas de litige actuel, bien qu’il soit possible qu’un tiers ou une partie puisse se faire connaître plus tard et contester, auquel cas la matière relève de la juridiction contentieuse. Tous s’entendent donc pour constater que le juge exerce sa juridiction contentieuse lorsqu’il se prononce sur des intérêts opposés faisant suite à des débats contradictoires entre au moins deux personnes dont l’une est poursuivie en justice par l’autre. En matière gracieuse, il s’agit plutôt d’une demande initiée par une ou plusieurs personnes qui s’entendent. À l’étape où la procédure est initiée, il n’y a donc aucun heurt, donc pas de défendeur. Faudrait-il présumer, avant même que la situation se présente, si elle se présente, qu’une personne, telle personne pourrait s’opposer? Par ailleurs, qu’est-ce qu’un adversaire présumé? Si l’adversaire est connu, il est normal que la procédure soit contentieuse. Devrons-nous, dans chaque cas, imaginer qu’il pourrait y avoir un adversaire potentiel même si personne ne s’est encore manifesté ou, du seul fait de son existence, en conclure que la procédure doit être contentieuse? Il s’agit là, vous le comprendrez, d’un écueil que nous souhaitons à tout prix éviter. Nous croyons donc, pour notre part, que la définition proposée, si elle était retenue, ait pour effet de restreindre considérablement l’étendue des matières qui pourraient être qualifiées de gracieuses.

L’exercice visant à définir la matière gracieuse mérite en conséquence, de notre part, qu’on s’y arrête le plus sérieusement du monde. Nous ne doutons pas que votre ministère ait consacré tout le temps nécessaire à l’étude de cette question et à la rédaction de cette définition, mais il est légitime que nous souhaitions participer activement à l’ensemble des travaux d’analyse et de réflexion consacrés aux matières gracieuses.

Un autre aspect de la définition nous apparaît également problématique. Dans l’hypothèse où la première phrase de l’alinéa 2 de l’article 47, indiquant que les matières gracieuses sont celles que la loi qualifie telles, signifierait qu’une liste serait dressée à cet effet, nous vous informons d’emblée que nous sommes peu enclins à approuver la confection d’une telle liste. Compte tenu de la volonté de circonscrire dans une définition l’expression «matières gracieuses», ne serait-il pas préférable de se référer à cette définition et aux critères qu’elle contient pour évaluer si telle procédure est de nature gracieuse ou non? La question est fondamentale pour nous et mérite un examen attentif des tenants et aboutissants de chacune des options.

L’évolution constante du droit, tributaire de l’évolution de la société, comme en témoigne l’adoption du projet de loi n° 84, c’est-à-dire la Loi instituant l’union civile, nous démontre bien la nécessité de ne pas céder aussi rapidement à la tentation de circonscrire le contenu de ce que sont et seront à l’avenir les matières gracieuses. La déjudiciarisation entreprise par votre ministère n’est certes pas arrivée à son terme, de sorte que, si aujourd’hui la matière… la société considère normal que telle matière suive les prescriptions relatives aux matières contentieuses, demain, elle invoquera peut-être l’opportunité et même l’importance de la transformer en matière non contentieuse. Pourquoi alors figer dès maintenant l’état actuel du droit dans un contexte aussi évolutif que celui qui prévaut sous votre gouvernement? Pour notre part, nous n’en voyons pas la nécessité tant et aussi longtemps que nous ne serons pas convaincus de la pertinence d’une telle liste ou d’une telle qualification par le législateur. Certes, l’existence d’une telle liste ou qualification aurait le mérite d’empêcher pour l’avenir de coûteux et d’interminables débats entre la Chambre des notaires du Québec et le Barreau du Québec, mais ce seul argument ne peut nous convaincre entièrement du bien-fondé d’une telle proposition. C’est donc la confection même de cette nomenclature qui représente pour nous une source d’appréhension dans le contexte où elle ne serait pas le résultat d’une collaboration étroite entre la Chambre des notaires et le ministère de la Justice.

Vous comprendrez qu’il est difficile, même délicat, pour la Chambre de se prononcer dès maintenant sur ces questions, alors même que les propositions à l’étude ne portent pas sur les matières gracieuses. À tout le moins, pouvons-nous escompter dès maintenant que les actuelles procédures non contentieuses ainsi que toutes les autres qui, par tradition, le sont ? les demandes en reconnaissance judiciaire du droit de propriété, par exemple ? soient intégrées dans cette liste si telle liste doit exister et que le ministère de la Justice profite de l’occasion qui lui est donnée pour mener à terme sa réforme en matière de demandes conjointes de séparation de corps et de divorce sur projet d’accord en qualifiant cette dernière de «matière gracieuse»? Aussi, dans l’hypothèse où vous choisiriez d’aller de l’avant, nonobstant les réserves que nous avons exprimées, nous souhaitons alors participer étroitement aux discussions. Comme nous l’avions signalé dans notre mémoire faisant suite aux travaux de la Commission de réforme du Code de procédure, il nous semble difficile de concilier l’idée que des modifications soient apportées aux procédures non contentieuses sans que nous soyons invités à participer directement aux travaux au moment où ils ont lieu. Nous réitérons donc notre demande d’être mis à contribution chaque fois que les procédures non contentieuses sont, d’une manière ou d’une autre, remises en question et, à plus forte raison, lorsqu’il s’agira de distinguer, en fonction de la définition qui sera retenue parmi les procédures, celles qui sont de nature gracieuse et celles qui ne le sont pas.

Par ailleurs, nous souhaitons aborder dès maintenant un autre aspect de la réforme proposée qui concerne et affecte directement les procédures non contentieuses, et il s’agit de la procédure applicable à toutes les demandes en justice proposée aux articles 130 à 135. Nous remarquons que l’article 130, contrairement à 110 du Code de procédure civile introduit par le projet de loi n° 54, n’exclut pas les matières gracieuses de la procédure générale, soit de la demande introductive d’instance. Nous ne pouvons que nous questionner à l’égard d’une telle inclusion. Les demandes en matière gracieuse ne s’apparentent d’aucune manière aux autres demandes, puisqu’elles ne consistent pas en un débat contradictoire devant un tribunal et qu’elles n’ont pas de défendeur. Comment pourrait-on alors concilier cette inclusion avec la définition proposée en matière gracieuse où il apparaît clairement qu’une de ses composantes est l’absence d’adversaire? Nous sommes d’autant plus étonnés de ce recul que l’exclusion des matières gracieuses aux règles générales de la demande introductive d’instance dans le projet de loi n° 54 nous laissait croire, manifestement à tort, que nous avions réussi à vous faire la démonstration du bien-fondé de notre proposition.

n (14 h 20) n

En somme, vous le constatez sans aucun doute, en ce qui concerne la Chambre des notaires, le sujet mérite encore réflexion. Nous vous proposons de vous faire parvenir, à courte échéance, un mémoire faisant état, dans un premier temps, de nos recherches approfondies notamment en droit comparé et, dans un second temps, de nos réflexions et de nos recommandations. Il ne reste plus qu’à souhaiter que, pour vous, le débat reste ouvert sur cette question. Et si votre intention est de présenter un projet de loi à l’automne, nous vous demandons alors, puisque cela est possible, de retirer de ce projet les dispositions concernant les matières gracieuses et de les intégrer plutôt dans la phase III. Nous disposerions alors du temps nécessaire pour vous produire un mémoire qui serait susceptible de contribuer à votre réflexion.

En conclusion, nous espérons, M. le ministre, que les inquiétudes que nous avons partagées avec vous aujourd’hui trouveront un écho favorable afin de conserver dans le Code de procédure la place que doivent occuper les matières gracieuses dans le système judiciaire. Les justiciables ne doivent pas être privés, dans certaines matières qui ne relèvent pas du champ adversarial, d’avoir accès à la justice sans avoir à être soumis à de lourdes procédures s’apparentant au débat contradictoire. C’est pourquoi nous vous demandons de différer toute démarche législative en ce qui concerne les matières gracieuses et d’accepter que nous vous soumettions une étude approfondie sur cette question.

Enfin, nous vous remercions, M. le ministre, Mme Lamquin-Éthier, Mmes, MM. les députés, de nous avoir permis de nous exprimer une fois de plus et nous vous assurons de notre entière collaboration.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci pour vos commentaires. Et nous allons maintenant amorcer la période d’échange avec M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Merci, M. le Président. Chers collègues, MM. les notaires, permettez-moi, avant d’entrer dans le vif du sujet, peut-être de donner suite à une demande qui avait été formulée lors de notre rencontre de la semaine dernière. J’ai ici une table, un document comparatif des dispositions du document sessionnel du CPC et du rapport du Comité sur le Code de procédure civile. Alors, ça va permettre pour tout le monde pour l’avenir de travailler avec un même document. Alors, je vais le faire distribuer, avec votre permission, et déposer devant la commission cette table comparative, table de concordance, si vous le voulez, entre les différents articles.

Document déposé

Le Président (M. Lachance): Document déposé.

M. Bégin: Alors…

Une voix: …

M. Bégin: Comment?

Mme Lamquin-Éthier: On va le regarder, merci, a priori. Merci beaucoup.

M. Bégin: Vous ne pouvez pas faire mieux. Alors, merci, messieurs. Vous avez quand même insisté sur un aspect qui a vraiment été soulevé mais de manière inverse par les avocats qui ont comparu la semaine dernière relativement à la médiation obligatoire par le juge. Est-ce que vous ne considérez pas que la conférence de règlement à l’amiable, la possibilité de conciliation sont une évolution significatives des règles de… ou en tout cas des possibilités de régler ou de trouver une solution différente au règlement des conflits que celle d’être entendu spécifiquement par le mode adversarial devant le juge? La médiation que vous ajoutez aux deux autres qui ont été introduites spécifiquement dans le Code et qui n’est pas mise de côté par ailleurs, puisqu’il y a tout un processus de médiation qui a été établi d’abord par le Barreau mais aujourd’hui par les différents ordres professionnels ? je pense aux ingénieurs, aux notaires; il y a également les comptables, je crois, qui sont intéressés à cela ? alors, pouvez-vous me donner là pourquoi, vous, alors que le Barreau est si fermement opposé, vous êtes aussi fortement intéressés à ce qu’on l’introduise?

M. Laurent (Claude): Je demanderais à Me Guay de répondre.

M. Guay (Gérard): Je pense que ça fait partie de notre culture de viser l’entente, les parties. Et on le voit dans nos bureaux, dans nos cabinets, dans nos études que les parties, quand on réussit à discuter avec eux, négocier, on réussit d’avoir une entente, et nous sommes convaincus que, pour le tribunal, c’est la même chose. Le but du tribunal, c’est de régler le litige. C’est sûr qu’il faut à l’occasion qu’il tranche, mais, lorsqu’il peut procéder à une médiation, lorsqu’il peut procéder à une conciliation entre les parties, c’est encore préférable.

La Cour supérieure, on l’a dit dans notre texte, a fait des mesures en ce sens-là un service de médiation qui a eu un certain succès. On sait qu’il existe des organismes qui vont également en ce sens-là. Mais c’est que nous sommes convaincus fermement que toutes ces mesures alternatives de résolution des conflits sont une voie d’avenir et qui sont demandées par les individus, parce que les gens veulent régler leur litige et pas nécessairement, là, par un jugement qui tranche la question mais par une façon de s’assurer que les intérêts de tous sont pris en compte et qu’il y ait une solution qui satisfasse les gens. Donc, c’est pour ça que nous appuyons les démesures mises de l’avant par le document de consultation, et que nous croyons… et, quant à nous, nous irions même encore un peu plus loin, mais c’est sûrement une voie à la bonne direction, car c’est vers là que les justiciables nous appellent.

M. Bégin: Vous mettez donc dans le même processus la médiation, qui aurait eu cours dans un procès civil… qu’il pourrait y avoir dans un procès qui est toujours civil mais en matière familiale ou matrimoniale. Vous verriez là que le juge pourrait, à un stade x des procédures, dire: Je crois que vous devriez ? pas «vous pouvez» mais «vous devriez»? procéder à de la médiation. Qui serait faite par qui, à ce moment-là?

M. Guay (Gérard): Elle pourrait être faite… Bien, c’est sûr que les tribunaux pourront peut-être envisager eux-mêmes d’avoir un juge coordonnateur qui prévoit ces choses-là, mais il existe aussi, comme vous l’avez souligné tantôt, un certain nombre de professionnels qui ont suivi une formation en matière de règlement des différends en matière de médiation, en matière d’arbitrage ? ici on parle beaucoup plus de médiation, là ? qui leur donne les instruments pour arriver à assurer le succès de cette médiation. Et je crois que le tribunal, lorsqu’il a commencé à étudier un dossier, il est en mesure… les juges, il faut leur faire confiance, ils sont en mesure de voir si vraiment il y a lieu… il n’y aurait pas une possibilité de conciliation, il n’y aurait pas une possibilité qu’on arrive à une entente par médiation. Donc, il faut leur faire confiance de ce côté-là et se donner les ressources que la société, par l’entremise de ses professionnels qui sont qualifiés pour ça, met à notre disposition pour arriver à un règlement.

M. Bégin: D’accord pour cela. Vous avez également abordé la protection des témoins. Vous avez soulevé qu’il y avait un manque de protection des témoins même si le document sessionnel prévoit une modification à cet égard. Le fait, par exemple, que l’avocat serait obligé dorénavant d’avancer pour la première journée l’indemnité pour la perte de temps et sur la question de frais et non pas le 2 $ usuel, là, qu’on connaissait bien, là, ne pensez-vous pas que ça devrait limiter un peu, en tout cas tout au moins, l’utilisation tardive que vous avez appelée plutôt d’abusive, là, du subpoena de dernière minute? Est-ce que vous pensez que le fait que quelqu’un soit obligé d’avancer, mettons, 90 $ au lieu de simplement dire: J’ai besoin de vous; venez donc au cas où; et, si j’ai besoin de vous, vous êtes là; sinon, bien, tant pis, est-ce que vous ne pensez pas que le fait d’être obligé d’avancer… ? je pense que maintenant le règlement parle de 90 $ ? est-ce que vous ne pensez pas que ça va avoir un frein sur ces utilisations abusives des procédures?

M. Guay (Gérard): On est peu enclin à le croire. C’est sûr que c’est une bonne voie. Ce 90 $, c’est sûr que c’est plus que le petit 2 $ qu’on peut se faire donner, là, pour un billet de métro, ou un billet d’autobus, ou un taxi. Mais, ceci étant dit, si la cause est moindrement d’importance ? puis là, ici, on peut parler d’une cause facilement de 50 000, 60 000 $, qui est quand même commun devant les tribunaux ? les avocats n’hésiteront pas à dire: On avance les 90 $ puis on fait venir les témoins. C’est que c’est dans la culture des avocats, malheureusement, de vouloir… Ils ont toujours peur que le témoin puisse être utile. Au cas où, on le fait venir. Puis je pense que peut-être que ça peut amener un frein dans les premiers temps, mais les vieux réflexes vont revenir et ça va être plus coûteux au niveau des dépens, mais il n’en demeure pas moins que je ne pense pas que ce soit là un frein, là, qui soit suffisant pour éviter ce genre d’abus.

M. Bégin: Prenons-le à l’inverse. Admettons que vous ayez raison et que ça ne constitue pas un frein, vous restez avec votre critique à l’effet qu’il faudrait y en avoir une, qu’est-ce que vous proposez qui pourrait constituer un frein pour dire, bien, qu’on est en présence de subpoenas abusifs?

n (14 h 30) n

M. Guay (Gérard): Bien, je crois qu’au départ dans le projet de loi n° 54 et dans le document, ici, on a ce nouvel esprit de gestion de l’instance. Je crois que, si le juge qui est saisi de l’instance… Les parties auront à faire un calendrier. Je pense que les gens pourraient… on pourrait aller jusqu’à demander au procureur de justifier les témoins qu’ils ont à faire entendre et que le juge aurait à dire: Oui, c’est vrai… Il pourra trancher puis dire… Mais ça lui permettrait, déjà au départ… que peut-être ça amènerait peut-être des admissions entre les parties, peut-être que ça amènerait à ce que les parties se disent ou se désistent de tel, tel témoin parce qu’ils s’aperçoivent que ce n’est pas vraiment nécessaire ou que le tribunal leur suggérerait que ce n’est peut-être pas nécessaire, mais, chose certaine, déjà le juge aurait déjà fait une certaine coordination des témoins qui devraient être entendus pour qu’on se limite aux gens qui ont vraiment quelque chose de pertinent à dire à l’instance. Et, partant de là, bien, les témoins pourraient être entendus, et ce seront ceux qui auront vraiment besoin d’être entendus, et ça évitera peut-être des déplacements inutiles.

M. Bégin: Ne croyez-vous pas qu’après avoir fait un passage quand même majeur entre la façon de fonctionner qui prévaut actuellement où l’avocat décide seul de son côté, à l’insu bien sûr du juge ou encore de son adversaire ? au fait il y a une gestion vraiment organisée de l’instance ? vous ne trouvez pas que d’aller plus loin, à la limite, de connaître ce qu’il y aura comme preuve ? parce que pour connaître si on a besoin d’avoir un témoin ou pas, il faut non seulement des allégations mais un ensemble de faits qui justifient que ce fait est assez important pour nécessiter la présence d’un témoin ? vous ne pensez pas que c’est aller un peu loin dans la gestion de l’instance, et faire en sorte que là on fasse le procès avant le procès?

M. Guay (Gérard): Non, pas nécessairement, puisque les… Il faut comprendre que maintenant les procès doivent… se font à livre ouvert, hein? L’époque il y a 20 ans où qu’on faisait des petites surprises, là, pour arriver avec le dernier jugement puis les petites surprises à la dernière minute ça n’existe plus, ça fait déjà une bonne quinzaine d’années que les tribunaux, et les règles de pratique, et tout ça, les règles du Code de procédure civile sont d’arriver à amener les parties à se dévoiler avant l’instance ce qu’ils avaient comme preuve. Alors, je ne pense pas que ce soit nécessairement aller plus loin parce qu’il faut comprendre que, dans cela, ce que l’on vise, c’est de protéger des tiers ? j’allais dire «innocents», là, mais je n’ose pas utiliser le terme ? mais utiliser des tiers qui n’ont rien à voir…

M. Bégin: Dans les deux sens qu’on connaît, ce n’est pas bon.

M. Guay (Gérard): … ? oui ? alors des tiers qui finalement n’ont pas d’intérêt à l’instance. On oblige une personne qui n’a rien à voir avec le procès ? on comprend que c’est un témoin, ce n’est pas une partie ? qui vient et qu’on lui dit: Tu vas prendre de ton temps. Tu vas laisser tes activités et tu vas venir devant le tribunal dire ce que tu as à dire. C’est très noble et ça fait partie de nos obligations démocratiques. Mais, ceci étant dit, il faut quand même éviter les abus. Alors, les propositions du document sont dans le bon sens, mais nous croyons qu’il faut les développer encore plus pour s’assurer que les témoins seront vraiment bien protégés et qu’on n’utilisera pas… qu’on ne les fera pas venir inutilement au tribunal.

M. Bégin: J’en viendrais maintenant aux procédures gracieuses, là. À 47, au deuxième paragraphe, me semble-t-il que l’on y donne ce qu’on appelle une définition de ce que sont les matières gracieuses. Et vous avez introduit deux éléments: un qui constituait une critique, en tout cas, vous analysiez le fait d’adversaire connu ou présumé et/ou encore le fait d’avoir une liste des éléments qui constitueraient une matière gracieuse. Devant un choix à faire, qu’est-ce que vous préféreriez, l’existence d’une définition plus satisfaisante que celle que vous avez là ou bien la présence d’une liste?

M. Laurent (Claude): Écoutez…

M. Bégin: Il faut choisir.

M. Laurent (Claude): C’est en discussion à l’heure actuelle et c’est pour ça qu’on vous proposait de faire une réflexion complète sur le sujet en introduisant là les droits étrangers qu’on pourrait consulter. C’est clair que la Chambre a toujours préféré une définition large mais qui entraînait à chaque fois des quiproquos avec le Barreau du Québec. On serait peut-être aujourd’hui enclins à fixer d’une façon définitive l’ensemble des matières gracieuses mais à condition qu’on les connaisse, et c’est un peu le message qu’on faisait ici, dans notre discours.

M. Bégin: Quel est le lien que vous faites avec la proposition de l’article 75 dont «le droit d’agir comme procureur devant les tribunaux est réservé aux avocats et les notaires peuvent cependant agir à ce titre dans les matières que la loi qualifie de gracieuses ou lorsque la loi le prévoit spécifiquement»?

Évidemment, là, on peut avoir toutes sortes d’ajustements autour de ce texte-là, là. Mais prenons-le deux secondes tel qu’il est là. Et, «lorsque la loi le prévoit spécifiquement», à moins d’erreur de ma part, ça référerait à votre loi constitutive, là, qui fait une énumération des matières dites non contentieuses ou gracieuses si on prend l’expression d’aujourd’hui.

J’avoue là que j’essaie de faire le tour de ça et je ne suis pas sûr que j’en vois les périmètres par rapport à ce que vous venez de dire, là. Parce que vous avez dans votre loi une liste. Nous avons une définition. Vous dites: Notre coeur bat entre deux. Mais, à un moment donné, il va falloir qu’on fasse un choix là-dedans. Moi, en soi, je suis relativement indifférent à l’une ou l’autre des deux solutions. Je veux bien mettre dans la loi celle qui va nous satisfaire pour bien comprendre tout le monde la même chose sur le même sujet. Mais on ne peut pas avoir à la fois une définition large puis une liste exhaustive là; il y a quelque chose qui ne fonctionnerait pas là.

M. Laurent (Claude): Écoutez, à tout prendre, on prendrait une définition large. Puis ce qui nous permettrait éventuellement de demander ? et c’est ce qu’on disait tout à l’heure ? de demander, au nom du public, si, par exemple, en matière de séparation de corps et de divorce, il était question de déclarer le projet d’accord matière non contentieuse, bien, évidemment, une définition large nous permettrait d’aller chercher cette juridiction.

Par contre, lorsqu’on dit et si je lis «lorsque la loi le prévoit», à l’article 75, il faudrait connaître l’ouverture du législateur concernant ce que la loi prévoira éventuellement. Et c’est pour ça que c’est difficile pour nous de répondre, puisqu’on ne connaît pas la liste en question. Par exemple, il existe, en matière non contentieuse, la requête en reconnaissance judiciaire du droit de propriété. Elle n’a jamais été qualifiée de non contentieuse. Nous, on l’a toujours considérée comme étant une matière gracieuse. Alors, s’il y a une liste, on aimerait bien voir cette matière gracieuse incluse, mais on ne connaît pas la liste, et de là notre ambivalence.

M. Bégin: Est-ce que vous ne pensez pas que, dans ces matières, il y a quand même évolution dans le temps? Parce que ce qui semble absurde un jour devient la norme plusieurs années plus tard. Et ce que vous venez de décrire comme étant quelque chose qui vous semble évident comme étant non contentieux ou gracieuse, alors qu’il ne l’est pas énuméré, peut-être que, dans quelque temps, la loi le dira spécifiquement. Parce que, «lorsque la loi le prévoit spécifiquement», c’est peut-être la loi aujourd’hui, mais la loi parle toujours, ce serait peut-être la loi de demain aussi. Alors, on peut, dans un x temps, apporter un amendement à une loi quelconque et on dira à ce moment-là que «la loi le prévoit spécifiquement».

M. Laurent (Claude): Je suis tout à fait d’accord avec vous.

M. Bégin: O.K. Vous avez soulevé la question que les matières gracieuses n’étaient pas des instances, donc pourraient être exclues des règles de l’instance ? j’ai essayé de résumer ? est-ce que je vous ai bien compris en disant cela?

M. Guay (Gérard): Oui, mais, en d’autres mots, on voulait… ce que l’on souhaite, c’est qu’on revienne à ce que l’on avait, l’article 110 du projet de loi n° 54 qui avait exclu les matières gracieuses de la requête introductive d’instance, alors c’est simplement ça, parce que, finalement, les matières gracieuses ne se prêtent pas peut-être au même cheminement procédural que les matières contentieuses, évidemment.

M. Bégin: Alors, vous seriez d’accord à ce qu’on revienne à l’ancien texte…

M. Guay (Gérard): Oui.

M. Bégin: du chose… Et je pense qu’effectivement il n’y avait pas une intention de changer, mais, dans les faits, je vous concède que les textes actuels peuvent prêter à cette interprétation. Alors, je voulais poser la question, parce que je voudrais bien être certain qu’on parlait de la même chose. Alors, on apportera les modifications qui s’imposent. Là je ne suis pas sûr d’avoir bien retenu mes notes, c’est à l’article 130.

Une voix: 130 et 135.

M. Bégin: Ah! c’était celui-là. O.K. Alors, voilà. C’était ce… Ah! il y a l’entrée en vigueur.

Lorsque le Barreau est venu, ils ont également mentionné cette possibilité-là en disant qu’il faudrait qu’on attende, parce qu’autrement on aurait trois codes de procédure civile en vigueur en même temps.

Une voix: Quatre.

n (14 h 40) n

M. Bégin: Oui. Là, là, quatre, ça c’est quand on exagère, on tombe dans trop loin. Il y a un mot pour ça. Il y aurait celui qui est là actuellement, dans la partie I, celle dont on parle; il y aurait la partie II, celle qui a été adoptée, qui va être en vigueur en janvier 2003; il y aurait la partie III, qui est la partie d’exécution des jugements, à peu près 500, 515 en montant, troisième partie, donc trois codes. Si on adopte la partie I et qu’on la met en vigueur en même temps que la partie II, on aurait deux parties de Code: une concernant les articles 1 à environ 490, 500, plus les articles sur, voyons, l’appel, et ensuite les petites créances, et troisièmement les recours collectifs qui ont été adoptés dans la première partie, donc plus que la moitié du Code, et ça constituerait deux blocs qui ? en tout cas, je l’ai dit et personne à date ne m’a contredit sur ça ? sont deux parties qui sont relativement distinctes l’une de l’autre, c’est-à-dire que l’exécution des jugements possède peu des grands principes généraux qui servent à l’exécution de la procédure en cours de route, l’instance, alors que la partie I et la partie II sont beaucoup plus intimement liées. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de rapport, je dis qu’il y en a moins. Par exemple, si c’est faux, ce que je viens de dire quand on parle pour les matières, comme les… pas les rétractations de jugement, mais la… Voyons, comment on appelle ça, là? 33, c’est la…

Une voix: Recours extraordinaires.

M. Bégin: Les recours extraordinaires, les pouvoirs de surveillance et de contrôle, 33, au début, l’appel, dans certains cas, et ce que l’on retrouve dans les articles 834 et suivants, ce n’est pas sans rapport avec l’autre, au contraire. Mais, règle générale, c’est assez distinct l’un de l’autre. Alors, il me semble qu’il serait préférable d’en avoir deux que d’en avoir trois. Vous ne pensez pas?

Le Président (M. Lachance): En conclusion là-dessus.

M. Guay (Gérard): Conclusion. C’est que, nous, c’est sûr, la préoccupation qu’on a à ce niveau-là, c’est au niveau des matières gracieuses. Alors, est-ce qu’on va avoir une définition de matières gracieuses à la… nouveau Code, une nouvelle première partie du Code, puis on va avoir, dans le livre VI qui va toujours subsister, on aura les matières non contentieuses?. Si on nous dit par une disposition transitoire que des matières non contentieuses sont des matières gracieuses, à ce moment-là, sûrement qu’on peut vivre avec ça pendant un certain temps.

(Consultation)

M. Bégin: On me dit que c’est tout à fait ça qui était dans l’esprit des choses parce qu’effectivement il ne s’agit pas d’avoir des textes qui se contredisent, il faut que, quand l’un apparaisse, l’autre disparaisse et que, si on n’a rien, bien, c’est l’ancien texte qui prévale. C’est pour ça qu’en ayant deux blocs qui sont relativement distincts l’un de l’autre, sauf des cas, comme vous venez de mentionner, très évidents et l’autre également, comme pour les jugements, et ça, je pense, le pouvoir de surveillance et de contrôle, on peut faire les arrimages qui s’imposent par une ou deux dispositions transitoires sans qu’il y ait de problème juridique qui en découle.

Le Président (M. Lachance): Merci. Mme la députée de Bourassa et porte-parole de l’opposition.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Bonjour. Pardonnez-moi, je vais prendre vos noms. Me Laurent, bonjour. Me Guay, bonjour, également. Quand le comité Ferland a entrepris la série de consultations qui se totalisent sur une période de trois ans, vous savez qu’ils auront rencontrés plus de 60 personnes ou groupes. Évidemment, c’est une consultation qui est extrêmement importante et la réforme qui nous occupe est également une réforme importante. Le comité Ferland, lorsqu’il a pris son mandat, a toujours gardé présent à l’esprit qu’il devait avoir, comme cela lui avait été demandé, le souci de placer le citoyen au coeur de la révision du Code de procédure civile. La semaine dernière d’ailleurs, M. le ministre de la Justice, dans les notes d’ouverture qu’il a faite, reprenait au même effet qu’il était essentiel que la population demeure au coeur des préoccupations que nous avons comme législateurs.

Quand il a… Moi, je veux donner… revenir sur ce que vous disiez précédemment en ce qui a trait aux matières gracieuses mais situer ça dans le meilleur intérêt du justiciable, un, pour qu’il puisse s’y retourner alors qu’on a introduit, je crois, un nouveau concept et, deux, éviter des problèmes d’interprétation. Le Barreau soulevait, comme point majeur, comme irritant, que le livre VI ? et c’est ce que vous avez dit, Me Guay, je crois ? que le livre VI du Code actuel relatif aux matières non contentieuses continuera de s’appliquer tant que la phase III ne sera pas adoptée. Par contre, la phase II introduit un nouveau concept, celui de matières gracieuses assorties d’une disposition d’interprétation que l’on retrouve au second alinéa de l’article 47 du document sessionnel et qui en élargit considérablement la portée. Cette disposition est inexistante dans le Code actuel. Alors, comment conciliera-t-on ces deux régimes?

Donc, je crois comprendre que ça va poser un problème important de conciliation et c’est contraire, je crois, au meilleur intérêt du justiciable.

M. Guay (Gérard): Je vous dirais que pas nécessairement, parce que faut comprendre, là, que… M. le ministre nous a assurés que les matières non contentieuses, dans une phase transitoire, seraient considérées comme matières gracieuses. Alors, on part… on a des matières qu’on sait qui sont… au lieu de les appeler «non contentieuses», on va les appeler «gracieuses». Ça répond aussi en gros à la définition qu’on a, à une définition améliorée qu’il y a de l’article 47. Donc, partant de là, je ne peux pas… on ne peut pas dire qu’il y a vraiment là incompatibilité. Ce qu’il faut comprendre que ? et c’est ce qu’on faisait ressortir dans la présentation initiale ? c’est que la notion de juridiction gracieuse, là, c’est vraiment un élément fondamental en droit procédural, hein? Tous les pays d’Europe maintenant et depuis longtemps ? même, on parle… je veux dire… je remontais à des textes du siècle dernier, en Allemagne ? ont cette juridiction gracieuse. Alors, ici, au Québec, on a traditionnellement eu «contentieux» puis on disait «non contentieuses» sur des petites procédures là un peu à côté.

Mais, fondamentalement, c’est un des rôles de l’État, du pouvoir judiciaire plus précisément, d’avoir une juridiction où il applique les lois en absence de litige. C’est ce qu’on appelle une «juridiction gracieuse». Donc, c’est dans une structure logique et normale d’un Code de procédure civile et dans la mesure où on fait un arrimage le temps qu’on change la… qu’on arrive à la phase III. Je pense que ça peut se faire quand même aisément, dans l’intérêt des citoyens, parce que c’est eux qui sont derrière tout ça, et on est bien d’accord avec ça. Et, justement, c’est que c’est justement le genre de procédure que les justiciables apprécient parce qu’il n’y a pas de litige et il y a… ils veulent simplement… l’État dit: Pour telle décision, il faut que j’appose… qu’un juge appose son approbation. Alors, le justiciable se présente, et il y va, et, à ce moment-là, il est satisfait parce qu’il n’y a pas eu de litige et de longs débats judiciaires.

Mme Lamquin-Éthier: C’est drôle. Bon, c’est un domaine évidemment qui est bien spécifique. Quand je lis votre mémoire avec évidemment les éléments que vous soulevez, d’abord, il y a un problème… vous voyez un problème qui origine de l’actuelle rédaction du deuxième alinéa de l’article 47. Quand on lit votre mémoire, évidemment, il y a tout le dilemme qui est rattaché à l’établissement d’une liste. Donc, il y a un problème avec une définition qui ne semble pas faire consensus et, d’autre part, il n’y aurait pas plus consensus s’il s’agissait d’établir une liste.

Quand on veut se mettre au «diapason», j’imagine qu’avant d’en arriver là ? puis c’est le mot que vous utilisez ? au-delà de l’argument de la modernité, là, la préoccupation, au-delà… Vous dites ? attendez que je vous retrouve ? à la page 4, bon, vous convenez qu’on «introduit la notion de “matière gracieuse” en droit québécois, plaçant en conséquence notre droit procédural au diapason des autres pays de tradition civiliste». Pour avoir lu votre mémoire, je n’ai pas eu l’impression et je n’ai pas l’impression qu’on peut être au diapason des autres pays de tradition civiliste. Je n’ai pas l’impression qu’on en est là. Il semble y avoir une difficulté au niveau de la compréhension ou de l’application d’une définition qui ne fait pas consensus.

Et il y aurait également difficulté… Puis là j’ai oublié de vous dire en partant qu’on introduit une définition nouvelle. Alors, est-ce que, chez nous, cette notion-là, pour la communauté juridique, est-ce que c’est la même chose pour tout le monde? Deux, il y a un problème au niveau de la définition, puis vous semblez, la Chambre des notaires et le Barreau… Un dit que ça restreint, l’autre dit que ça élargit considérablement, donc de la difficulté. Il y aurait aussi la difficulté pour la liste.

Alors, pensez-vous qu’on est vraiment prêts à être au diapason avec les autres pays de tradition civiliste en ce qui a trait aux matières gracieuses?

M. Guay (Gérard): La première des choses, c’est sûr, déjà, d’avoir introduit la juridiction gracieuse à notre Code, de le proposer, déjà, je pense que c’est un pas dans la bonne direction. Et, partant de là, bien, pour le reste, je pense qu’effectivement la définition a à être bonifiée, il y aura sûrement à travailler sur les contours de tout ça. Mais, au départ, je pense que, effectivement, cette juridiction gracieuse, nous, du moment qu’on part de ce principe-là, bien là, à ce moment-là, on va devoir regarder le Code et voir qu’elles seraient peut-être les procédures et voir à partager tout ça.

Alors là je crois qu’effectivement, nous, comme on disait dans le mémoire, ça nous met au diapason des pays civilistes de cette façon-là. Puis, souvent, les pays vont avoir différentes façons de voir. Ils vont, certains, voir plus général, là, mais il faut une définition qui donne un petit peu une orientation en général, là. Des fois, on peut se poser la question: Est-ce que si, oui ou non, c’est une matière gracieuse ou contentieuse? Puis, d’autre part, bien, il peut ou ne pas y avoir de liste, là, pour déterminer en certains cas qu’est-ce qu’il en est exactement.

n (14 h 50) n

Mme Lamquin-Éthier: Mais là en ce qui avait trait, en tout cas à tout le moins, à la définition qui était contenue au deuxième alinéa, semble-t-il qu’on n’avait pas l’air de comprendre, tous n’ont pas l’air de comprendre, parce que vous soulevez que, habituellement, ça implique qu’il n’y ait pas d’adversaire…

M. Guay (Gérard): Oui.

Mme Lamquin-Éthier: … ? bon ? alors que ce qu’on lit actuellement, dans 47, deuxième alinéa, dit bien «adversaire connu ou présumé». Donc, il y aurait un problème au niveau de la compréhension.

M. Guay (Gérard): Et de…

Mme Lamquin-Éthier: Moi, ce qui me préoccupe, Me Guay ? et pardonnez-moi d’insister, peut-être que je m’exprime mal ? je veux savoir si la notion «matière gracieuse», pour la communauté juridique, c’est une notion que la communauté juridique connaît et applique depuis de nombreuses années.

M. Guay (Gérard): Je vous dirais que oui et que c’est dans l’air depuis de nombreuses années. J’ai eu le privilège de siéger, au nom de la Chambre des notaires, il y a une dizaine d’années sur un comité du ministère de la Justice et déjà on en parlait. Donc, on ne peut pas prétendre que c’est tout nouveau. Déjà, c’est un domaine sur lequel plusieurs juristes ont travaillé. Il y a eu une évolution. C’est la première fois que ça vient nommément dans les textes législatifs, mais on ne peut pas dire que c’est de quoi de nouveau qui nous tombe du ciel, là. Ça fait, comme je vous dis, une dizaine d’années, là, que les comités ministériels et autres étudient cette question-là. Je sais que le rapport Ferland ? où, soit dit en passant, nous n’avons pas été invités à faire… ni en groupe de travail ni autrement, à donner notre opinion ? a aussi traité cette question-là un petit peu. Alors, c’est évident que ce n’est pas une question qui est vraiment nouvelle et qu’au contraire c’est quelque chose qui est dans l’actualité dans le domaine de la procédure civile depuis plusieurs années.

Ceci étant dit, il faut que la définition… Et c’est là qu’est notre propos sur les écueils que l’on soulevait, c’est d’éviter que la définition fasse en sorte que, surtout quand on parle d’adversaire connu ou présumé, que, tu sais, quelqu’un en vienne… Ça pourrait porter flanc à une interprétation très restrictive où il suffirait que quelqu’un, quelque part, peut-être un jour pourrait venir contester que ça en ferait une juridiction contentieuse. C’est dans ce sens-là que nous avons une réserve.

Mme Lamquin-Éthier: Mais, moi, ma préoccupation, c’est qu’il pourrait y avoir, enfin, je crois ? peut-être ai-je tort, et je vous remercie de me le dire ? qu’il pourrait y avoir un problème à banaliser clairement l’expression. Vous dites même dans votre mémoire: «À défaut de pouvoir y arriver, nous vous recommandons de retrancher la définition proposée.» Est-ce qu’il y a lieu de faire une distinction entre ce qui est dans l’air, ce dont on discute, et les conclusions et les consensus auxquels on arrive?

Et j’aimerais porter à votre attention… Vous savez, le rapport Ferland, c’est trois années, hein, de consultations sur le terrain, c’est des consultations avec des personnes, des groupes. Et en annexe, il y a la liste des communications écrites qui ont été reçues et également une liste des personnes qui ont été rencontrées à l’occasion de la consultation publique. Et je m’étais assurée que la Chambre des notaires y soit, et elle est bien mentionnée en annexe, la Chambre des notaires, et je trouve ça extrêmement important parce que vous êtes également des partenaires du domaine. Alors, est-ce qu’il pourrait y arriver que ce soit difficile de clairement banaliser cette expression et le craignez-vous au point où vous-mêmes, dans votre mémoire, vous dites: «Nous vous recommandons de la retrancher de la définition proposée»?

M. Guay (Gérard): Ce que l’on propose et ce que disait le document, c’est qu’on veut justement voir un peu à quoi ça ressemble au complet, évidemment, là, parce que c’est sûr que la phase III va nous amener, bon, un éclairage supplémentaire. C’est dans ce sens-là qu’on l’indique. Ceci étant dit, c’est sûr qu’on peut très bien vivre avec une définition remaniée de la juridiction gracieuse pour s’assurer que ça couvre les cas qui peuvent exister actuellement comme étant non contentieux et que ça ne prête pas flanc à tout rendre dans le champ des procédures contentieuses.

Mme Lamquin-Éthier: Vous disiez: Bon, là on a un document sessionnel qui aborde évidemment la phase II de la révision de la procédure civile et qui comporte une proposition quant aux deux premiers livres de ce Code. Vous avez insisté en ouverture. Vous n’estimez pas… «La Chambre des notaires n’estime pas souhaitable que le ministre puisse adopter la procédure civile à la pièce.» Et vous avez même été plus loin en indiquant très clairement votre désir que le ministre de la Justice puisse surseoir à la présentation d’un projet de loi pour l’automne, ce qu’il a d’ailleurs confirmé lors de notre dernière rencontre. Bon, c’est ça, il confirme qu’il y aura une deuxième consultation en commission parlementaire, cette fois sur le projet de loi, au cours de la session parlementaire de l’automne. C’est donc clair que, pour M. le ministre, il a donc l’intention de déposer un projet de loi.

Encore une fois, quand on parle du meilleur intérêt du justiciable, qu’on veut éviter des problèmes, j’aimerais beaucoup que vous reveniez là-dessus, sur votre avis, les recommandations que vous formuliez à l’égard de l’entrée en vigueur.

M. Guay (Gérard): Bien, c’est sûr qu’il est préférable ? c’est ce que nous avons souligné dans le mémoire ? que ça rend d’un seul bloc et c’est sûr que ça nous permet, à tout le monde… Bien, premièrement, pour les praticiens, un magistrat, un avocat, un notaire, ce serait plus facile, et on apprend le nouveau Code puis on apprend… on se dit: Telle date, on commence avec le nouveau Code, et tout ça. Sinon, on s’ouvre la porte à des dispositions transitoires, et tout ça, c’est plus complexes. Alors, c’est dans ce sens-là. Puis le fait que justement qu’on voit… on a une réforme où il y a une partie qui finalement ? on ne connaît pas encore la phase III ? qui va avoir une incidence sur la phase II. Donc, c’est dans ce sens-là qu’on avait… qu’on faisait cette recommandation-là de façon à ce qu’on puisse voir plus clairement, là, les tenants et aboutissants de toute la réforme.

Mme Lamquin-Éthier: Puis d’ailleurs le ministre, il a dit qu’il accueillait de façon très… avec ouverture, les commentaires et les suggestions qui lui sont adressés dans le cadre des consultations. Je pense que tout le monde est unanime à cet égard-là, alors j’ose penser qu’il va en tenir compte.

Dans votre mémoire, vous n’avez pas formulé de commentaires ? je ne veux pas vous prendre par surprise, là, ce n’est pas l’objectif ? à l’égard de l’article 2 qui introduit le principe d’économie. Est-ce que vous pensez que, vu qu’on avait déjà… Lors de l’adoption de la loi n° 54, M. le ministre avait convenu à des orientations et il avait retenu celle de la proportionnalité, qu’on retrouve à l’article 14. Est-ce que vous ne pensez pas que la proportionnalité inclut le souci des coûts que l’on retrouve à l’article 2?

M. Guay (Gérard): Bien, sans être un grand débat sur le sujet, nous n’en sommes pas les spécialistes, on est quand même en général satisfaits et d’accord avec ce qui a été proposé ici. Je pense que c’est ça que le citoyen demande, une justice qui soit aussi économique. Et, souvent, c’est ce que les citoyens… c’est ce qui rebute les citoyens à aller devant le tribunal, c’est la peur que ça leur coûte trop cher et que, finalement, ils ne soient pas vraiment gagnants. Donc, je pense que le souci d’économie, cette notion d’économique, là, qui est prévue ici, à l’article 2, je pense qu’elle sera bien acceptée des justiciables, c’est dans le sens de ce qu’ils désirent, et ce, dans leur intérêt, comme on vous parlait au début.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, sauf que… Est-ce qu’on peut penser par ailleurs que ça puisse avoir un effet contraire? Et j’aimerais porter à votre attention ce que le Barreau dit. Le Barreau considère qu’énoncer une telle règle au Code de procédure aurait ou pourrait avoir pour effet de teinter le comportement de certains et, par exemple, teinter également le comportement des procureurs en fonction d’un soi-disant équilibre causé par l’inégalité économique et financière d’une partie par rapport à l’autre. Or, les décisions judiciaires ? et c’est le point important ? ne doivent pas être rendues en fonction de la situation économique des parties mais plutôt en fonction des droits qu’elles prétendent exercer, de la preuve qui est présentée au tribunal et de la règle de droit qui leur est applicable.

M. Guay (Gérard): Vous savez, les tribunaux auront… Et je pense que c’est surtout face aux juges qu’on s’adresse ici et c’est eux qui auront, je crois, à avoir ce souci-là et voir à prendre les meilleures décisions. Je suis sûr que les juges vont tenter et vont continuer à être aussi équitables et dire le droit tel qu’il doit être fait et régler les litiges le mieux possible, mais ils auront cet élément-là à tenir en considération, et je ne pense pas que ça va défavoriser le justiciable, bien au contraire, je crois que les justiciables vont… ça va sûrement changer des choses dans les comportements des magistrats et des avocats, mais je ne crois pas que ce soit en défaveur des justiciables, bien au contraire, je crois qu’eux, ils vont sortir gagnants de cela.

n (15 heures) n

Mme Lamquin-Éthier: Merci beaucoup. Vous dites dans votre mémoire: «Le notaire est un juriste dont la principale fonction n’est pas de plaider devant les tribunaux. Il n’en demeure pas moins cependant que cette situation lui permet à la fois de bien connaître les règles procédurales et de pouvoir les étudier et les critiquer avec détachement.»

Vous avez fait valoir des éléments importants en ce qui a trait à l’article 41 où on traite d’intégrité de la personne, et j’aimerais plus particulièrement en ce qui a trait au majeur qui est gardé dans un établissement de santé ou de services sociaux, le deuxième alinéa de l’article 41… Actuellement, ça se passe comment dans ce domaine-là lorsqu’une demande est introduite devant le tribunal, que celle-ci concerne l’intégrité de la personne?

M. Guay (Gérard): C’est que, actuellement, les règles ? là on parle de règles de lieu d’introduction de l’action ? alors les règles à l’article 41… Et d’ailleurs c’était une demande depuis plusieurs années de la Chambre des notaires qu’elles soient élargies parce que le contexte familial fait en sorte que les gens ne sont pas toujours dans le même district, ils ont déménagé, et ce qui fait que, lorsqu’on sera obligés d’aller dans le district du domicile du majeur ou de la personne incapable, bien, des fois, il n’est même plus dans ce district-là parce qu’il demeure quelques kilomètres plus loin, mais c’est le district voisin. Ça se voit, entre autres, dans la région de Montréal puis… Il était sur la Rive-Sud, il est rendu sur la Rive-Nord, etc., et ça a créé des problèmes d’introduction de l’action. Et l’article 41, vraiment, nous l’approuvons parce que nous sommes… ça fait suite… en tout cas, nous, c’était l’une de nos demandes de ce côté-là.

Le seul point sur lequel nous avons fait une remarque, c’est qu’on parle d’établissements de santé et de services sociaux, alors ce qui ne vise que les centres publics, alors que des fois les gens peuvent être dans un centre privé et on aimerait que les gens qui… si la personne majeure vit dans un centre privé, exemple, un centre d’hébergement, une résidence pour personnes retraitées, qu’elle puisse avoir la même possibilité de pouvoir prendre le recours dans ce district-là. Alors, si la dame âgée qui demeurait jadis à Montréal demeure maintenant dans une résidence privée sur la Rive-Sud, bien, qu’on puisse le faire là-bas, parce que probablement… parce que souvent, ce qu’on voit en pratique, c’est que souvent, lorsque les parents vieillissent, les enfants ont tendance à les ramener près d’eux, hein, parce qu’ils veulent… c’est plus facile de leur donner les soins, les rencontrer, et tout ça. Alors donc, ils vont les amener près d’eux, mais souvent ce n’est plus nécessairement le domicile de la personnes âgée. Donc, c’est dans ce sens-là qu’on a fait ces demandes-là et qu’on demande de compléter en incluant les centres privés dans ces endroits, dans l’établissement privé, ici.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, couvrir beaucoup plus large que les établissements tels que définis à la loi.

M. Guay (Gérard): Bien, beaucoup plus large… un peu plus large. Déjà, la définition, ici, la 41 est une amélioration par rapport aux règles actuelles de 1972-1974 du Code de procédure civile actuel, mais on vise juste à la bonifier, là, pour prévoir aussi les centres privés.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci messieurs de la Chambre des notaires du Québec pour votre participation aux travaux de cette commission.

Remarques finales

Et nous allons maintenant aborder l’étape finale de nos travaux. D’abord, les remarques finales du groupe parlementaire formant l’opposition et, ensuite, le groupe parlementaire formant le gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Alors… C’est-u nous autres?

Le Président (M. Lachance): Oui. Mme la députée de Bourassa.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, au terme des consultations que nous avons eues ou au terme de la consultation générale et des auditions publiques que nous avons eues, je pense que tous les groupes ont donné des avis qui sont unanimes en ce qui a trait à l’entrée en vigueur. Alors, je pense que l’ensemble du nouveau Code de procédure civile devrait entrer en vigueur à la même date pour en faciliter non seulement la transition, mais également pour assurer la cohérence et la continuité procédurale. Cela aurait également pour objectif d’éviter d’engendrer des problèmes de confusion et des problèmes d’interprétation qui malheureusement… dont les contribuables malheureusement feraient les frais.

En deuxième lieu, je crois que les consultations ont permis aux groupes d’apporter des commentaires importants tant sur les principes que sur les orientations et sur les enjeux de la phase II. D’ailleurs, M. le ministre de la Justice a d’ores et déjà confirmé son intention d’apporter des corrections principalement pour respecter les engagements qu’il avait lui-même pris lors de l’adoption de la loi n° 54, donc pour que l’on retrouve au projet de loi exactement la même chose qu’il y avait avant. Et il a mentionné notamment l’article 4, le cinquième alinéa de l’article 26. Il va également regarder plus particulièrement la notification et la signification. Et il a également pris en note d’autres écarts qu’il y avait avec la loi n° 54 et également un écart qu’il y avait avec le projet de loi n° 50 ou la loi n° 50, le Code civil, notamment l’article 168.

En ce qui a trait au rapport Ferland, bien qu’on puisse comprendre que le ministre ne se sente pas obligé comme tel de l’appliquer globalement ou intégralement, on peut cependant se demander si c’est prudent de s’en écarter. Et, si c’est prudent de s’en écarter lorsqu’il paraît difficile de justifier les écarts, nous, on croit que le rapport Ferland, c’est une démarche réfléchie qui s’est faite sur trois années. Plus de 60 personnes, organismes, des juristes, là, de la communauté ont été consultés. Ils sont arrivés à des consensus. Ces consensus-là nous apparaissent extrêmement importants, et ce serait peut-être plus sage ou plus prudent pour le ministre de les respecter pour justement éviter des problèmes d’interprétation qui pourraient survenir, et évidemment ces problèmes-là iraient en sens contraire avec le désir de placer le citoyen au coeur de la réforme. Alors, ça, ça nous préoccupe beaucoup et je crois que l’étude article par article va certainement être l’occasion de revenir là-dessus.

Il va de soi qu’on remercie tous les groupes qui ont pris le temps et la peine de déposer des mémoires et on les remercie pour les commentaires qu’ils ont formulés à l’intention des membres de cette commission. Et, encore une fois, merci à vous également de la Chambre.

Le Président (M. Lachance): Merci, Mme la députée de Bourassa et porte-parole de l’opposition officielle. M. le ministre de la Justice.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Nous voici donc au terme de la commission parlementaire de consultation portant sur le document sessionnel de la réforme du Code de procédure civile, phase II. Quatre groupes nous ont soumis des mémoires. Leur excellent travail nous a fourni des commentaires pertinents et sérieux qui nous ont permis des échanges fructueux. Les travaux de cette commission nous permettront d’élaborer un projet de loi pour adoption dès cet automne. J’aimerais souligner le travail considérable des représentants de tous les groupes consultés et les remercier pour l’intérêt et la contribution qu’ils apportent à l’avancement de cette loi et de cette réforme.

Dans un premier temps, je me propose, de façon très synthétique, bien sûr, d’évoquer les préoccupations majeures de chacun des groupes. Par la suite, j’aborderai quelques préoccupations communes et je vous annoncerai dès aujourd’hui certaines orientations eu égard au projet de loi.

Les représentants du Barreau du Québec nous ont présenté leurs préoccupations générales. Je ne crois pas me tromper en affirmant que la proposition accordant au tribunal le pouvoir de condamner le procureur d’une partie, si la procédure ou le comportement abusif lui est directement attribuable, à payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par une autre partie, tel objet de leur commentaire le plus vif.

Bien que je ne partage pas l’argument fondé sur la trahison du secret professionnel, je suis sensible à d’autres arguments soulevés et j’annonce dès maintenant que ce point ne sera pas repris dans le projet de loi. La question pourrait être reconsidérée plus tard si les premières années d’application de la réforme révélaient que les moyens utilisés pour éviter les abus de procédure ne suffisent pas.

Par ailleurs, le Barreau s’inquiète également et fortement des mesures proposées pour éviter des délais indus occasionnés par des appels stratégiques de décisions interlocutoires soit devant les tribunaux de première instance soit devant les organismes soumis au pouvoir de contrôle et de surveillance de la Cour supérieure. Dans mon esprit, nous devons intervenir dans les deux cas, mais le problème le plus crucial se retrouve dans la seconde catégorie de recours.

Soyez assurés cependant que nous réexaminerons très attentivement les deux questions et que nous y apporterons certaines limites si elles devaient se révéler nécessaires.

L’Association du Jeune Barreau de Montréal met en doute la sagesse de certaines mesures adoptées en juin dernier. Elle souligne, par exemple, les délais pour mettre une cause en état ou pour demander une prolongation de même que celle sur les limites introduites en matière d’interrogatoire au préalable ou d’expertise. Comme j’en ai fait part la semaine dernière, nous ne reviendrons pas sur ces mesures. Il est plus sage, à notre avis, d’évaluer l’effet de ces dispositions dans trois ans, comme nous en avons pris l’engagement lors de l’adoption de notre première phase du Code de procédure civile.

n(15 h 10)n

Des représentants du Jeune Barreau de Montréal ont fait plusieurs commentaires intéressants qui alimenteront notre réflexion. Je souligne, entre autres, leurs préoccupations quant au problème de preuves qui pourrait être lié à l’utilisation des technologies de l’information en procédure civile. Ils reconnaissent cependant la nécessité d’intégrer dans notre procédure civile une telle utilisation. Leur intervention nous incitera à s’assurer davantage, le cas échéant, que la transmission des documents offre des garanties suffisantes de conformité.

La Chambre des huissiers nous a habitués, au fil des consultations publiques relatives à des projets de modifications à la procédure civile, à des mémoires étoffés, détaillés et précis. Leur mémoire dans le présent dossier ne fait pas exception. Bien que certaines suggestions concernent plutôt l’exécution, donc la phase III de la réforme, plusieurs ajustements devraient être apportés au document sessionnel pour améliorer le fonctionnement de la procédure civile. Je note que leurs préoccupations principales visent la notification en général et la signification par le huissier de justice en particulier.

Un ménage s’impose eu égard à l’ensemble des dispositions du Code en cette matière, et je devrais dire: et dans d’autres lois particulières. Cependant, je ne voudrais surtout pas que la Chambre des huissiers comprenne qu’il est de mon intention de diminuer, de marginaliser ou de banaliser les actes des huissiers de justice; je partage au contraire le point de vue qu’ils jouent un rôle déterminant dans la protection des droits des justiciables. Il est de mon intention que le projet de loi reflète davantage cette réalité.

Enfin, la Chambre des notaires qui est présentement devant nous est généralement très satisfaite des dispositions contenues dans le document sessionnel. Les deux préoccupations principales, sans ignorer l’ensemble de leurs suggestions, concernent les matières gracieuses et l’utilisation des modes amiables de résolution des différends. L’ensemble des dispositions du document sessionnel relatives aux matières gracieuses sera réexaminé attentivement à la lumière de ces commentaires. Par exemple, le deuxième alinéa de l’article 47 sera modifié en y enlevant les mots que vous avez soulevés, entre guillemets, «et l’adversaire connu et présumé». Minimalement, ce membre de phrase-là sera enlevé.

Également, à l’article 41, vous avez bien raison de le dire, que le lieu d’introduction de l’instance a voulu être élargi pour simplifier les choses pour les citoyens et non pas pour la justice en elle-même, mais faire en sorte que les gens qui sont dans des situations très particulières aient accès rapidement et facilement à la justice, et je crois que le lieu d’introduction de l’action est une de ces matières-là. Donc, même la remarque finale que vous avez faite sera tenue en compte au moment de l’adoption du projet de loi.

J’en profite également pour dire, même si je pensais que vous l’aborderiez: Le huis clos permet au notaire d’assister… à l’article 8, sera ajouté. L’article 90, de ne pas détruire certains documents, comme par exemple les testaments holographes, les évaluations médicales, les procès-verbaux du conseil de tutelle, les mandats, etc., sera conservé. Je vous remercie d’ailleurs de nous avoir fait état de cela, puisque, dans une bonne intention, on pouvait se retrouver à perdre des documents holographes qui ont une grande importance pour les gens que ça concerne mais aussi sur une base historique de garder des documents, manuscrits, et je crois que vous avez fait oeuvre très utile en le soulignant. Enfin, l’article 130, exclure les règles de matières gracieuses du modèle général introductif comme dans le projet de loi n° 54, je vous en ai fait état tout à l’heure, ce sera fait.

Par ailleurs, je ne partage pas tout à fait le point de vue de la Chambre que les deux premières phases de la réforme soient timides relativement à l’utilisation et à la promotion des modes amiables ou déjudiciarisés. Il me paraît difficile pour l’instant de faire davantage dans le cadre strict de la procédure civile. Je rappellerai la conférence de règlement à l’amiable tant en première instance qu’en appel, l’accent mis sur la conciliation, la gestion de cause, la médiation en matière de recouvrement des petites créances et la promotion de la nouvelle philosophie dans le préambule même du document sessionnel.

J’aimerais aborder rapidement certaines préoccupations communes à tous les intervenants et aux représentants de l’opposition officielle. J’évoquerai quatre questions: les divergences avec le projet de loi n° 54, celles avec les recommandations du rapport du Comité de révision sur la procédure civile, la terminologie du document sessionnel et enfin ce que certains intervenants ont qualifié de fragmentation de la réforme.

Il a été fait grand état de certaines divergences avec les dispositions adoptées le 8 juin dernier. Nous avions nous-mêmes, depuis le dépôt du document sessionnel, relevé la plupart des différences soulevées par l’un ou l’autre des intervenants. Certaines différences résultent du fait que les textes de ce projet de loi n’étaient pas intégrés au moment du dépôt du document sessionnel. On se rappelle que ça a été adopté le 8 et le dépôt le 13, donc il a pu y avoir superposition.

Je l’ai dit à plusieurs reprises mercredi dernier, devant cette commission, je n’ai pas l’intention de renier des mesures que nous avons cru sage d’adopter dans un passé aussi récent. Je ne donnerai que deux exemples: la règle contenue au paragraphe cinquième de l’article 26 du document sessionnel de même que le second paragraphe de l’avis au défendeur prévu à l’article 135 de ce document seront rédigés de façon à se conformer aux dispositions adoptées en juin. Je ne dis pas cependant que toute différence sera écartée; certaines s’imposent en raison du contexte de la nouvelle structure ou des modifications terminologiques proposées. Nous devons également, je pense, apporter quelques corrections qui s’imposent à l’occasion. Mais, dans leur essence, les textes de la première partie de la réforme seront repris.

Pour ce qui est des différences du document sessionnel d’avec les recommandations du rapport du Comité de révision de la procédure civile, je dirais qu’elles sont, dans la substance, des règles évidemment aussi marginales sinon davantage que celles relatives aux dispositions adoptées en juin. Sur cette question, le bâtonnier du Barreau du Québec soulignait mercredi dernier que le législateur n’est pas obligé de suivre aveuglément tous les points soulevés et qu’il reconnaissait avec beaucoup de respect ce droit du législateur. Mais, je le répète, ces différences sont marginales et le caractère général de plusieurs recommandations laisse place à des façons différentes de rédiger le texte de loi.

La plupart des groupes se sont un peu inquiétés également de la terminologie utilisée dans le document sessionnel. La durée des travaux de la commission à cette étape-ci ne permettait pas de soulever tous les exemples, mais il me semble que les expressions et termes qui ont soulevé des commentaires sont relativement peu nombreux. Il ne faut pas perdre de vue non plus que le document sessionnel prend en considération les travaux de la Commission de terminologie juridique du ministère de la Justice. Je vous rappelle que des représentants des différentes cours ainsi que du Barreau du Québec et de la Chambre des notaires prennent part à ces travaux avec des juristes et des linguistes du ministère. Je vous dis que nous avons reçu très récemment, il y a à peine un mois et demi, des remarques de ce comité à l’égard de différentes terminologies que nous utilisions et que nous croyions incorporer dans notre vocabulaire comme étant du béton. Et pourtant, ce comité formé de juges, comme, par exemple, le juge en chef qui vient d’être nommé à la Cour d’appel, le juge Robert, qui n’était pas à ce moment-là juge en chef, nous recommandant d’enlever des vieilles utilisations bien connues mais qui n’étaient pas françaises ou qui étaient mieux transmises avec d’autres termes. Alors, autant il ne faut pas faire preuve d’audace cavalière, autant il faut, lorsque requis, faire les changements qui s’imposent. Nous aurons l’occasion d’examiner chacun des exemples soulevés et d’en vérifier le mérite. Je vous assure que je n’ai pas l’intention d’introduire dans le projet de loi des termes et expressions qui constitueraient un risque sérieux de débats inutiles devant les tribunaux. Je crois néanmoins qu’il ne faut pas craindre d’améliorer la qualité du Code et examiner pour ce faire les options les plus intéressantes qui s’offrent à nous.

Enfin, j’aimerais vous préciser ma pensée quant aux commentaires sur la fragmentation de la réforme. Je constate que certains craignent qu’une mise en vigueur trop rapide de cette deuxième partie de la réforme entraîne les justiciables et la communauté juridique dans la confusion. Certains espèrent et suggèrent d’attendre l’adoption de la troisième phase avant la mise en vigueur de la seconde. Il y a bien sûr des difficultés inhérentes à une transition au moment d’une réforme. Cependant, il faut préciser que l’essentiel de la réforme est déjà adopté et entrera en vigueur le 1er janvier 2003. Il y a plus de différence entre le Code actuel et le Code modifié pour la première partie de la réforme qu’il n’y en aura entre les phases II et III. Compte tenu de l’ensemble des aspects bénéfiques pour l’ensemble des citoyennes et citoyens des nouvelles mesures contenues dans le document sessionnel, il me semble qu’il est préférable de regrouper les deux premières phases plutôt que l’inverse. Et je voudrais dire que, quand on plaide que le citoyen ne comprendra pas, il y a un problème dans cet argument-là, parce que, si les citoyens ne sont pas des spécialistes, par hypothèse, ils ne connaissent pas le Code. Alors, quand ils vont prendre connaissance du Code, ils vont lire ce qui est là et ils vont dire: Qu’est-ce que ça veut dire, ce mot-là? Par exemple, un mot qui a été utilisé, on ne le connaissait pas personne ? je le dis avec respect ? le mot «quérulence». Qu’est-ce que c’est que le mot «quérulence»? Si vous allez dans le dictionnaire, vous allez savoir que c’est exactement le phénomène que l’on connaît des personnes qui abusent de la procédure, et c’est vraiment une expression très courante et que le Barreau lui-même a utilisée, par exemple, dans un atelier, au mois de mai, au Manoir Richelieu. Alors, c’est un mot nouveau mais qui exprime un concept vraiment moderne, et pourquoi ne pas l’utiliser? Alors, je pense que ça, quand le citoyen va voir qu’est-ce que ça veut dire «quérulence»… Nous, on ne le savait pas. On va regarder dans le dictionnaire puis on va le savoir, même chose pour le citoyen. Et, inversement, si les avocats sont des spécialistes, c’est leur devoir que d’apprendre les lois nouvelles et de se familiariser. J’ai fait ma vie entière dans un domaine qui a été en pleine évolution pendant 25 ans, le domaine municipal. C’est un domaine où, quand j’ai commencé ma pratique, il y avait une loi aux 10 ans. Quand j’ai quitté et pendant tout le temps que j’ai pratiqué, il y avait 10 lois par année dans le domaine municipal. Certaines avaient 200 puis 300 articles; c’étaient des champs complètement nouveaux. Et qu’est-ce que l’on faisait à chaque année? On allait à l’école et après ça on devenait des professeurs pour ceux qui ne l’étaient pas, et ça faisait partie de ce que j’appellerais la modernité d’un avocat en pratique privée, parce qu’il est obligé de se tenir à jour.

n(15 h 20)n

Déjà, à la première moitié du nouveau Code s’ajouteraient toutes les nouvelles mesures relatives à l’appel, à l’adaptation de procédures particulières, au recouvrement des petites créances et aux recours collectifs. Ce choix, j’en conviens, exige un examen attentif pour assurer l’harmonisation de l’ensemble. Cet exercice sera fait. On le disait tout à l’heure, s’il y avait une clause entre ce que veut dire «matière non contentieuse» et «matière gracieuse», bien, évidemment, si on fait bêtement deux expressions, elles vont vouloir dire deux choses différentes. Si on dit cependant que l’une est égale à l’autre, le problème cesse, et à ce moment-là on a réglé le problème. Donc là où ce sera nécessaire, nous ferons cette harmonisation.

Alors, citons, par exemple, les biens essentiels avec des dispositions relatives aux recours extraordinaires. Aussi, je privilégie nettement une mise en vigueur rapide du projet de loi qui sera rédigé à partir du document sessionnel et, bien sûr, des commentaires que nous avons reçus et aussi du travail de collaboration qui sera fait tant avec le Barreau qu’avec la Chambre des notaires pour s’assurer que les textes que nous déposerons comme projet de loi auront bénéficié de l’apport de ces gens-là, et en engagement que j’ai pris d’ailleurs à l’égard du Barreau ici et dans des conversations non officielles, et également que je prends également devant la Chambre des notaires pour s’assurer que, lorsqu’il y a lieu de faire des rédactions, on trouve la meilleure formulation parce que souvent on s’entend sur l’esprit, mais c’est la terminologie qui peut faire la différence.

En terminant, j’aimerais remercier une autre fois les organismes, leurs représentants et collaborateurs qui ont consacré beaucoup de temps et d’efforts pour nous permettre leurs commentaires. Je m’en voudrais de ne pas souligner le travail de mes collègues députés, de même que de l’opposition officielle, et qui ont travaillé à bonifier ce projet de loi, et en particulier ? je le redis à nouveau ? particulièrement le travail de Mme Marie-Josée Longtin qui est assise à ma droite et de M. Aldé Frenette, qui est un acteur bien connu de notre procédure civile, puisqu’il était présent lors de la rédaction de la phase I, et de Me ? mon Dieu! j’oublie votre nom, monsieur ? …

Une voix: …

M. Bégin: …Rochefort, Me Rochefort. Alors, merci, M. le Président, merci aux membres de la commission.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. Sur ces propos, j’ajourne les travaux de la commission sine die étant donné que nous avons accompli notre mandat, et je remercie tous les membres de la commission pour leur excellente collaboration.

(Fin de la séance à 15 h 23)

 

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"Sed quis custodiet ipsos custodes?" — Juvénal, Satires, VI, 346.  En français : « Qui nous protègera contre ceux qui nous protègent ? »  In English: " Who will protect us from those who protect us? "

 — Mauro Cappelletti dans Louis Favoreu (dir.), Le pouvoir des juges, Paris, Economica, 1990, p. 115.
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“In public regulation of this sort there is no such thing as absolute and untrammelled ‘discretion’, that is that action can be taken on any ground or for any reason that can be suggested to the mind of the administrator; no legislative Act can, without express language, be taken to contemplate an unlimited arbitrary power exercisable for any purpose, however capricious or irrelevant, regardless of the nature or purpose of the statute. Fraud and cor­ruption in the Commission may not be mentioned in such statutes but they are always implied as exceptions. ‘Discretion’ necessarily implies good faith in discharging public duty; there is always a perspective within which a statute is intended to operate; and any clear departure from its lines or objects is just as objectionable as fraud or corruption.”

— Mr. Justice Ivan Cleveland Rand writing in the most memorable passage in Roncarelli v. Duplessis, [1959] S.C.R. 121 at the Supreme Court of Canada, page 140.
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The social tyranny of extorting recantation, of ostracism and virtual outlawry as the new means of coercing the man out of line, is the negation of democracy.

— Justice Ivan Cleveland Rand of the Supreme Court of Canada, Canadian Bar Review (CBR)
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"If we were lawyers, this would be billable time."
A Word on Caricature
“Humor is essential to a successful tactician, for the most potent weapons known to mankind are satire and ridicule.”

— “The Education of an Organizer”, p. 75, Rules for Radicals, A Practical Primer for Realistic Radicals by Saul Alinsky, Random House, New York, 1971.

I am no fan of Saul Alinsky's whose methods are antidemocratic and unparliamentary. But since we are fighting a silent war against the subversive Left, I say, if it works for them, it will work for us. Bring on the ridicule!  And in this case, it is richly deserved by the congeries of judicial forces wearing the Tweedle suits, and by those who are accurately conducting our befuddled usurpers towards the Red Dawn.

— Admin, Judicial Madness, 22 March 2016.
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